« Dans sa bonté, Dieu voulut faire en sorte que la Révélation donnée par lui en vue du salut de toutes les nations demeure tout entière à jamais. À cet effet, il confia à l’Église le trésor de la Parole divine que les pasteurs et le peuple fidèle concourent à conserver, à approfondir et à appliquer à la vie. Dieu lui-même, qui est absolument infaillible, a donc daigné communiquer à son Peuple nouveau qui est l’Église, une certaine infaillibilité participée. Celle-ci ne s’étend qu’aux questions de foi et de mœurs » (Congrégation pour la doctrine de la foi, Déclaration Mysterium Ecclesiae, n°2).

Ainsi, nous croyons fermement tout ce que l’Église catholique enseigne en matière de foi et de mœurs, parce qu'elle est infaillible dans son ensemble. Le Pape, successeur de l'Apôtre Pierre jouit également du charisme d'infaillibilité dans certaines conditions bien précises. Cette infaillibilité du Pape et de l’Église est naturellement contestée par les protestants, car l'avènement du protestantisme a été motivé par le sentiment selon lequel l’Église catholique se serait éloignée de l'enseignement de Jésus contenue dans la Bible.

1. L'infaillibilité de l’Église

« Après avoir, à maintes reprises et sous maintes formes, parlé jadis aux Pères par les prophètes, Dieu, en ces jours qui sont les derniers, nous a parlé par le Fils, qu'il a établi héritier de toutes choses, par qui aussi il a fait les siècles » (He 1, 1-2). Après avoir accompli tout ce qu'il avait à faire sur la terre, le Christ monta au ciel en laissant cet ordre : « Allez donc, de toutes les nations faites des disciples, les baptisant au nom du Père et du Fils et du Saint Esprit, et leur apprenant à observer tout ce que je vous ai prescrit. Et voici que je suis avec vous pour toujours jusqu'à la fin du monde » (Mt 28, 19-20).

Jésus confie ainsi à son Église la charge d'enseigner tout ce que lui-même a enseigné dans le monde entier et ce jusqu'à la fin de temps, en promettant à son Église son assistance perpétuelle pour qu'elle ne défaille pas. Ainsi, dès les temps apostoliques, le devoir de garder intacte « la foi transmise aux saints une fois pour toutes » (Jude 3) était une préoccupation majeure : « Eh bien ! Si nous-même, si un ange venu du ciel vous annonçait un évangile différent de celui que nous avons prêché, qu'il soit anathème ! Nous l'avons déjà dit, et aujourd'hui je le répète : si quelqu'un vous annonce un évangile différent de celui que vous avez reçu, qu'il soit anathème » (Ga 1, 8-9) ! D'où cette exhortation à Timothée : « Garde le bon dépôt avec l'aide de l'Esprit Saint qui habite en nous » (2 Tm 1, 12.14 ; 1 Tm 6, 20). Et encore : « Ce que tu as appris de moi sur l'attestation de nombreux témoins, confie-le à des hommes sûrs, capables à leur tour d'en instruire d'autres » (2 Tm 2, 2).

Saint Paul, parlant du mariage, dit : « Maris, aimez vos femmes comme le Christ a aimé l’Église : il s'est livré pour elle, afin de la sanctifier en la purifiant par le bain d'eau qu'une parole accompagne ; car il voulait se la présenter à lui-même toute resplendissante, sans tache ni ride ni rien de tel, mais sainte et immaculée » (Ep 5, 25-27). L’Église ne peut être belle, sans tache ni ride s'il arrivait que sa doctrine devienne erronée.

C'est donc à juste titre que les Écritures parlent de « l’Église du Dieu vivant, colonne et support de la vérité » (1 Tm 3, 15). Si l’Église était faillible dans sa foi et dans son enseignement, elle ne serait plus support et colonne de la Vérité. Jésus a aussi promis l'Esprit Saint qui conduira l’Église dans la Vérité toute entière (Jn 16, 13), le Christ lui-même étant « le Chemin, la Vérité et la Vie » (Jn 14, 6).

Il a donné cette prescription pastorale : « Si ton frère vient à pécher, va le trouver et reprends-le, seul à seul. S'il t'écoute, tu auras gagné ton frère. S'il n'écoute pas, prends encore avec toi un ou deux autres, pour que toute affaire soit décidée sur la parole de deux ou trois témoins. Que s'il refuse de les écouter, dis-le à l’Église. Et s'il refuse d'écouter l’Église, qu'il soit pour toi comme le païen et le publicain » (Mt 18, 15-17). Cette disposition devrait se perpétuer dans le temps, si bien qu'écouter l’Église parce qu'elle ne peut pas errer est primordial. C'est donc en raison de l'infaillibilité de l’Église que le Christ peut infailliblement dire, et ce jusqu'à la fin des temps : « Qui vous écoute m'écoute, qui vous rejette me rejette, et qui me rejette rejette Celui qui m'a envoyé » (Lc 10, 16).

2. Fondements bibliques de l'infaillibilité du Pape

On trouve dans la Bible deux épîtres de saint Pierre, ce qui signifie que Pierre jouissait d'une certaine infaillibilité en les écrivant, à l'instar des autres auteurs des livres bibliques. Mais l'infaillibilité de Pierre va plus loin. Il est le seul disciple à marcher sur l'eau, et quand il commençait à avoir peur et à s'enfoncer, Jésus lui tend la main et le ramène dans la barque (Mt 14, 22-32).

Après son triple reniement, Jésus demande trois fois à Pierre s'il l'aimait, et par trois fois, il lui demande expressément, à lui seulement, de paître son troupeau (Jn 21, 15-17).

C'est pour Pierre seul que Jésus a prié spécialement. Puis, il lui a donné l'ordre d'affermir ses frères dans la foi : « Simon, Simon, voici que Satan vous a réclamés pour vous cribler comme froment ; mais moi j'ai prié pour toi, afin que ta foi ne défaille pas. Toi donc, quand tu seras revenu, affermis tes frères » (Lc 22, 31-32). Comment la prière du Christ ne pourrait-elle pas porter du fruit ?

On voit dans les Actes des Apôtres comment notre Seigneur veille sur la foi de Pierre. Malgré que Jésus ait déclaré pur tous les aliments (Mc 7, 19), Pierre avait toujours du mal avec les animaux considérés impurs dans l'Ancien Testament qui n'avaient jamais approché de sa bouche. C'est à travers trois visions que le Seigneur lui rappelle la vraie doctrine : « Ce que Dieu a purifié, toi, ne le dis pas souillé » (Ac 11, 9).

De plus, c'est à Pierre seul que Jésus déclare que sa foi vient directement du Très-Haut. C'est sur lui seul que Jésus promet de bâtir son Église : « Tu es heureux, Simon fils de Jonas, car cette révélation t'est venue, non de la chair et du sang, mais de mon Père qui est dans les cieux. Eh bien ! moi je te dis : Tu es Pierre, et sur cette pierre je bâtirai mon Église, et les Portes de l'Hadès ne tiendront pas contre elle. Je te donnerai les clefs du Royaume des Cieux : quoi que tu lies sur la terre, ce sera tenu dans les cieux pour lié, et quoi que tu délies sur la terre, ce sera tenu dans les cieux pour délié » (Mt 16, 17-19). Cela est un écho de Is 22, 19-23 où Elyaqim reçoit les clés du Royaume de David pour en être le premier ministre, de sorte à ce que sa parole soit tenue pour parole du roi. Si Jésus fait de Pierre son représentant sur la terre, c'est pour qu'en matière de foi et de mœurs, sa parole soit tenue pour Parole du Christ.

On trouve un exemple dans les Actes des Apôtres. Certains voulaient qu'il soit exigé des non Juifs qui devenaient chrétiens la circoncision, en plus du baptême. Les discussions furent houleuses. Alors, les Apôtres se réunirent à Jérusalem auprès de Pierre qui délibéra. La lettre qu'il envoyait aux différentes communautés pour que la circoncision ne soit pas imposée aux nouveaux convertis commençait ainsi : « L'Esprit Saint et nous-mêmes avons décidé de ne pas vous imposer d'autres charges que celles-ci … » (Ac 15, 28). Pierre proclame ainsi que sa Parole est attestée par l'Esprit Saint et que ce qu'il énonce comme conduite, en union avec les autres Apôtres, est conforme à la volonté de Dieu.

3. Le Pape peut commettre des péchés

L'infaillibilité du Pape ne signifie pas que le Pape ne peut plus commettre des péchés. L'histoire de l’Église relève des papes dont la conduite n'a pas été du tout louable à un moment donné. Le Pape doit donc veiller sur lui-même, car il doit répondre devant Dieu de ses propres péchés et de sa gestion de l’Église : « À qui on aura donné beaucoup il sera beaucoup demandé, et à qui on aura confié beaucoup on réclamera davantage » (Lc 12, 48).

L’Écriture révèle que Pierre a renié Jésus par trois fois (Lc 22, 55-60). Paul déclare avoir repris Pierre ouvertement : « Mais quand Céphas vint à Antioche, je lui résistai en face, parce qu'il s'était donné tort. En effet, avant l'arrivée de certaines gens de l'entourage de Jacques, il prenait ses repas avec les païens ; mais quand ces gens arrivèrent, on le vit se dérober et se tenir à l'écart, par peur des circoncis. Et les autres Juifs l'imitèrent dans sa dissimulation, au point d'entraîner Barnabé lui-même à dissimuler avec eux » (Ga 2 ; 11-13). On remarquera que dans ces deux situations, il s'agit du comportement de Pierre qui est reprochable et non de l'enseignement qu'il donne sur la foi. Dans les deux cas également, il s'est amandé.

Jésus a indiqué qu'il est possible de donner un enseignement droit sans être soi-même un exemple à suivre. Il dit : « Sur la chaire de Moïse se sont assis les scribes et les Pharisiens : faites donc et observez tout ce qu'ils pourront vous dire, mais ne vous réglez pas sur leurs actes : car ils disent et ne font pas. Ils lient de pesants fardeaux et les imposent aux épaules des gens, mais eux-mêmes se refusent à les remuer du doigt. En tout, ils agissent pour se faire remarquer des hommes » (Mt 23, 2-5).

4. Conditions d'exercice de l'infaillibilité

L'infaillibilité du Pape a été définie en 1870 par le Concile Vatican I en ces termes : « Le Pontife romain, lorsqu’il parle ex cathedra, c’est-à-dire lorsque, remplissant sa charge de pasteur et de docteur de tous les chrétiens, il définit, en vertu de sa suprême autorité apostolique, qu’une doctrine sur la foi ou les mœurs doit être tenue par toute l’Église, jouit, par l’assistance divine à lui promise en la personne de saint Pierre, de cette infaillibilité dont le divin Rédempteur a voulu que fût pourvue son Église, lorsqu’elle définit la doctrine sur la foi et les mœurs. Par conséquent, ces définitions du Pontife romain sont irréformables par elles-mêmes et non en vertu du consentement de l’Église. Si quelqu’un, ce qu’à Dieu ne plaise, avait la présomption de contredire notre définition, qu’il soit anathème » (Concile Vatican I, Constitution Dogmatique Pastor aeternus).

Ainsi, les conditions à réunir pour jouir du charisme d'infaillibilité sont les suivantes :

  • le Pape doit préciser explicitement qu'il s'exprime en tant que pasteur et docteur de tous les chrétiens et qu'il a l'intention de donner une définition irréformable ;

  • l'objet de la déclaration doit concerner les matières de foi et de morale.

Cela ne concerne donc pas ce qu'il dit au quotidien, ses déclarations dans la presse, les mesures pastorales ou disciplinaires qu'il édicte, etc. Par exemple, si un Pape fixe l'âge minimum pour devenir prêtre à 25 ans et qu'un autre Pape le fixe à 26 ans, il s'agit de mesures disciplinaires qui ne sont pas concernées par l'infaillibilité.

L'infaillibilité de l’Église est étendue au Collège des évêques unis au Pape (Ac 15, 1-30). Selon le Concile Vatican II, « quoique les évêques, pris un à un, ne jouissent pas de la prérogative de l’infaillibilité, cependant, lorsque, même dispersés à travers le monde, mais gardant entre eux et avec le successeur de Pierre le lien de la communion, ils s’accordent pour enseigner authentiquement qu’une doctrine concernant la foi et les mœurs s’impose de manière absolue, alors, c’est la doctrine du Christ qu’infailliblement ils expriment. La chose est encore plus manifeste quand, dans le Concile œcuménique qui les rassemble, ils font, pour l’ensemble de l’Église, en matière de foi et de mœurs, acte de docteurs et de juges, aux définitions desquelles il faut adhérer dans l’obéissance de la foi » (Concile Vatican II, Consitution dogmatique Lumen gentium, n°25).

5. Les cas où l'infaillibilité papale a été exercée

Bien avant le Concile Vatican I qui a parlé explicitement de l'infaillibilité, le Pape Pie IX, en 1854, avait défini, en respectant les critères ci-dessus, le dogme de l'Immaculée Conception : « En conséquence, après avoir offert sans relâche, dans l’humilité et le jeûne, nos propres prières et les prières publiques de l’Église à Dieu le Père par son Fils, afin qu’il daignât, par la vertu de l’Esprit-Saint, diriger et confirmer Notre esprit ; après avoir imploré le secours de toute la cour céleste et invoqué avec gémissements l’Esprit consolateur, et ainsi, par sa divine inspiration, pour l’honneur de la Sainte et Indivisible Trinité, pour la gloire et l’ornement de la Vierge Mère de Dieu, pour l’exaltation de la foi catholique et l’accroissement de la religion chrétienne, par l’autorité de Notre-Seigneur Jésus-Christ, des Bienheureux apôtres Pierre et Paul et la Nôtre, …

… Nous déclarons, Nous prononçons et définissons que la doctrine qui enseigne que la Bienheureuse Vierge Marie, dans le premier instant de sa Conception, a été, par une grâce et un privilège spécial du Dieu Tout-Puissant, en vue des mérites de Jésus-Christ, Sauveur du genre humain, préservée et exempte de toute tache du péché originel, est révélée de Dieu, et par conséquent qu’elle doit être crue fermement et constamment par tous les fidèles.

C’est pourquoi, si quelques-uns avaient la présomption, ce qu’à Dieu ne plaise, de penser contrairement à Notre définition, qu’ils apprennent et qu’ils sachent que condamnés par leur propre jugement ils ont fait naufrage dans la foi et cessé d’être dans l’unité de l’Église ; et que, de plus, ils encourent par le fait même les peines de droit, s’ils osent exprimer ce qu’ils pensent de vive voix ou par écrit, ou de toute autre manière extérieure que ce soit » (Pie IX, Constitution apostolique Ineffabilis Deus, n°3).

Mais depuis la définition de l'infaillibilité par le Concile Vatican I, elle n'a été appliquée qu'une seule fois, lorsque le Pape Pie XII, le 1er novembre 1950 proclamait solennellement le dogme de l'Assomption en ces termes : « C’est pourquoi, après avoir adressé à Dieu d’incessantes et suppliantes prières, et invoqué les lumières de l’Esprit de vérité, pour la gloire du Dieu Tout-Puissant, qui prodigua sa particulière bienveillance à la Vierge Marie, pour l’honneur de son Fils, Roi immortel des siècles et vainqueur de la mort et du péché, pour accroître la gloire de son auguste Mère et pour la joie et l’exultation de l’Église tout entière, par l’autorité de Notre-Seigneur Jésus-Christ, des bienheureux apôtres Pierre et Paul, et par la Nôtre, Nous proclamons, déclarons et définissons que c’est un dogme divinement révélé que Marie, l’Immaculée Mère de Dieu toujours Vierge, à la fin du cours de sa vie terrestre, a été élevée en âme et en corps à la gloire céleste. C’est pourquoi, si quelqu’un — ce qu’à Dieu ne plaise — osait volontairement nier ou mettre en doute ce que Nous avons défini, qu’il sache qu’il a fait complètement défection dans la foi divine et catholique » (Pie XII, Constitution Apostolique Munificentissimus Deus, n°45-46).

On peut aussi ajouter un deuxième cas, l'impossibilité pour des femmes, d'être ordonnées prêtres. En 1994, le Pape Jean Paul II disait en effet : « Bien que la doctrine sur l'ordination sacerdotale exclusivement réservée aux hommes ait été conservée par la Tradition constante et universelle de l'Église et qu'elle soit fermement enseignée par le Magistère dans les documents les plus récents, de nos jours, elle est toutefois considérée de différents côtés comme ouverte au débat, ou même on attribue une valeur purement disciplinaire à la position prise par l'Église de ne pas admettre les femmes à l'ordination sacerdotale. C'est pourquoi, afin qu'il ne subsiste aucun doute sur une question de grande importance qui concerne la constitution divine elle-même de l'Église, je déclare, en vertu de ma mission de confirmer mes frères (cf. Lc 22, 32), que l'Église n'a en aucune manière le pouvoir de conférer l'ordination sacerdotale à des femmes et que cette position doit être définitivement tenue par tous les fidèles de l'Église » (Jean-Paul II, Lettre apostolique Ordinatio sacerdotalis, n°4).

***

Acte de foi : « Mon Dieu, je crois fermement toutes les vérités que vous m’avez révélées et que vous nous enseignez par votre sainte Église, parce que vous ne pouvez ni vous tromper, ni nous tromper. Amen ».


Abbé Kizito NIKIEMA, prêtre de l'archidiocèse de Ouagadougou (Burkina Faso)


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