Dieu et le coronavirus

Le Covid 19, plus qu’une simple maladie, est une pandémie qui touche le monde entier. Tous les jours, des hommes en meurent et le nombre des morts ne fait s’accroître à en croire les médias. Devant cette détresse universelle et les multiples décès, certaines personnes commencent à relativiser la puissance de Dieu dont témoigne la Bible. Elles se demandent si Dieu est toujours "le Seigneur des armées… le Fort, le Vaillant" (Ps 24,8-10), le tout-puissant "au ciel et sur la terre" (Ps 135,6), celui qui a fait sortir son peuple d’Egypte, le Dieu de l’impossible (cf. Jr 32,17 ; Lc 1,37), le Seigneur de l'univers, le Maître de l'histoire qui gouverne les cœurs et les événements selon son gré (cf. Est 4, 17b ; Pr 21, 1 ; Tb 13,2).

Ces doutes sur la toute-puissance de Dieu peuvent être fondés mais méritent, en ce temps de pandémie, d’être sérieusement examinés. La psychologie enseigne que la projection de l’homme sur la puissance de Dieu peut provenir du désir inconscient et infantile de toute puissance qu’il éprouve. En effet, la représentation que l’homme se fait spontanément de la puissance de Dieu, dépendrait en grande partie de ses rêves de toute puissance qui sommeillent en lui depuis son enfance. Lorsque l’enfant commence à découvrir ses propres limites, il naît inconsciemment en lui, l’idée d’un pouvoir en mesure d’accomplir dans l’immédiat le moindre de ses désirs.

Cette envie infantile du pouvoir influence fortement la manière de concevoir la puissance de Dieu. Le psychologue Antoine VERGOTE le souligne dans ses recherches sur la croyance et l’incroyance en rappelant la pensée de Sigmund Freud sur les représentations les plus communes d’une puissance divine : « L’homme délègue à Dieu la tâche de réaliser la toute-puissance dont il se sent privé. Ainsi le Dieu tout-puissant est-il le reflet de la toute-puissance imaginaire des désirs » [1].

Dans ce sens, l’homme penserait alors que la puissance de Dieu est comme un bâton magique qui accomplit toutes ses aspirations, qui impose ses volontés, qui donne des ordres, qui maîtrise et contrôle toute vie.

Mais selon la foi catholique, la puissance de Dieu n’est pas une puissance dominatrice, fracassante ou arbitraire. Elle est plutôt sage, juste et bonne. Elle est une puissance paternelle comme le proclame la profession de la foi catholique : « Je crois en Dieu le Père tout-puissant ». Autrement dit, la puissance de Dieu est intimement liée à son rôle de paternité. Elle ne se traduit que dans l’exercice de sa paternité c’est-à-dire dans l’objectif de prendre soin, de protéger, d’accompagner, de faire grandir.

Comme le rappelle le catéchisme de l’Eglise catholique, « Dieu est le Père tout-puissant. Sa paternité et sa puissance s'éclairent mutuellement. En effet, il montre sa Toute-puissance paternelle par la manière dont Il prend soin de nos besoins (cf. Mt 6,32); par l'adoption filiale qu'il nous donne ("Je serai pour vous un père, et vous serez pour moi des fils et des filles, dit le Seigneur Tout-puissant": 2Co 6,18); enfin par sa miséricorde infinie, puisqu'il montre sa puissance au plus haut point en pardonnant librement les péchés. » (CEC n°270).

En outre, la puissance de Dieu s’est éminemment manifestée dans la passion-mort-résurrection de son Fils. Par sa souffrance, son abaissement et sa mort sur la croix, le Christ a pris sur lui tout le poids du mal (cf. Is 53,4-6) et a enlevé le "péché du monde" (Jn 1,29)(cf CEC n° 1505). Par sa résurrection d’entre les morts, il a vaincu le plus grand mal qu’est la mort. « C'est dans la Résurrection et dans l'exaltation du Christ que le Père a "déployé la vigueur de sa force" et manifesté "quelle extraordinaire grandeur revêt sa puissance pour nous les croyants" (Ep 1,19-22) » (CEC n°272).

Ainsi, en ce temps de crise, il est plus qu’important de mettre sa foi en un Dieu au cœur de la lutte contre le coronavirus, de croire en sa puissance paternelle et en la puissance rédemptrice de la résurrection de Jésus. Dieu est et reste toujours le Père tout-puissant qui relève les humbles et comble de bienfaits ceux qui s’abaissent. Seule une telle foi peut nous aider d’une part, à croire aux choses les plus difficiles et incompréhensible pour l’intelligence humaine, et d’autre part à avoir la certitude que « rien n’est impossible à Dieu », que Dieu est plus fort que le mal comme celui du Covid 19 et que cette pandémie sera vaincue. Mais des questions subsistent : si Dieu peut vraiment éradiquer ce mal, pourquoi tarde-t-il à le faire rapidement ? Se plait-il à voir ses enfants souffrir et mourir du Covid 19 ? Quel est son plan d’action ou sa stratégie ?

 

Note :

[1] Sigmund Freud cité par Antoine VERGOTE, Religion, foi, incroyance, étude psychologique, Bruxelles, Mardaga, 1987, p. 217.

 

Abbé Valery SAKOUGRI,
Vicaire à la paroisse de Pabré
BURKINA FASO