Par l'appellation « Vierge Marie », les catholiques professent que Marie, la mère de Jésus, n'a pas connu d'homme toute sa vie, et que Jésus est son unique Fils, conçu du Saint Esprit (Lc 1, 35). La mention de frères et sœurs de Jésus dans l'évangile est utilisée par certains protestants pour nier cette conviction. Toutefois, les Saintes Écritures précisent qui sont les frères et les sœurs de Jésus dont il est question.

1. Les frères et sœurs de Jésus

L’Écriture parle des « frères » et des « sœurs » de Jésus notamment dans deux passages :

  • « D'où lui viennent cette sagesse et ces miracles ? Celui-là n'est-il pas le fils du charpentier ? N'a-t-il pas pour mère la nommée Marie, et pour frères Jacques, Joseph, Simon et Jude ? Et ses sœurs ne sont-elles pas toutes chez nous ? D'où lui vient donc tout cela » (Mt 13, 54-56) ?

  • « Sa mère et ses frères arrivent et, se tenant dehors, ils le firent appeler. Il y avait une foule assise autour de lui et on lui dit : "Voilà que ta mère et tes frères et tes sœurs sont là dehors qui te cherchent » (Mc 3, 31-32).

Une connaissance de la culture juive et des textes bibliques permet une meilleure intelligence de ces passages. Voici quelques exemples :

  • Le mot « frère » pouvait avoir une autre signification qui n'est pas liée à la parenté. En Ac 1, 15-16 par exemple, Pierre se lève au milieu de 120 personnes et les appelles « frères ». Ces 120 personnes ne pouvaient pas être les fils et filles d'une seule femme ;

  • le mot « frère » et « sœur » pouvait désigner plus largement les cousins. En Gn 14, 14-16, Abraham appelle « frère » Lot qui est en fait son neveu. En Gn 29, 15, Laban appelle « frère » son neveu Jacob (Gn 11, 26-28) ;

  • « Chacun devait renvoyer libres ses esclaves hébreux, hommes et femmes, personne ne devait plus tenir en servitude un Judéen, son frère » (Jr 34, 9) ;

  • « Tu ne tiendras pas l'Edomite pour abominable, car c'est ton frère » (Dt 23, 8) ;

  • David dit : « J'ai le cœur serré à cause de toi, mon frère Jonathan. Tu m'étais délicieusement cher, ton amitié m'était plus merveilleuse que l'amour des femmes » (2 S 2, 26) ;

  • « Hiram, roi de Tyr, lui avait fourni du bois de cèdre et de genévrier, et de l'or, tant qu'il en avait voulu, alors le roi Salomon donna à Hiram vingt villes dans le pays de Galilée. Il dit : "Qu'est-ce que ces villes que tu m'as données, mon frère", et, jusqu'à ce jour, on les appelle "le pays de Kabul" » (1 R 9, 11.13).

Mt 13, 54-56 cité ci-dessus donne les noms des frères de Jésus. Il s'agit de Jacques, Joseph, Simon et Jude. Leur parenté est élucidée lorsqu'on scrute les évangiles qui parlent de la mort de Jésus :

  • « Or près de la croix de Jésus se tenaient sa mère et la sœur de sa mère, Marie, femme de Clopas, et Marie de Magdala » (Jn 19, 25) ;

  • « Il y avait aussi des femmes qui regardaient à distance, entre autres Marie de Magdala, Marie mère de Jacques le petit et de Joset, et Salomé, qui le suivaient et le servaient lorsqu'il était en Galilée » (Mc 15, 40-41) ;

  • « Il y avait là de nombreuses femmes qui regardaient à distance, celles-là mêmes qui avaient suivi Jésus depuis la Galilée et le servaient, entre autres Marie de Magdala, Marie, mère de Jacques et de Joseph, et la mère des fils de Zébédée » (Mt 27, 55-56) ;

  • « Or, Marie de Magdala et Marie, mère de Joset, regardaient où on l'avait mis » (Mc 15, 47).

Il apparaît donc que la mère de Jacques, « le frère du Seigneur » (Ga 1, 19), s'appelait aussi Marie. La mère de Jacques est la sœur de la mère de Jésus. La mère de Jacques avait aussi pour fils Joset (Joseph) et Salomé. Leur père est Clopas ou Alphée (Mt 10, 3 ; Mc 3, 18). Jude se désigne « serviteur de Jésus Christ, frère de Jacques » et non pas « frère de Jésus » (Jude 1). Donc, Jude est aussi le fils de Cléophas et de Marie, sœur de la Vierge Marie. En résumé, selon les Écritures, Cléophas et son épouse, Marie, avaient pour fils Jacques, Joseph et Jude.

Un livre d'histoire très ancien du IVème siècle nous renseigne que Simon est un cousin du Christ. Il est fils de Clopas qui est lui-même le frère de Joseph le charpentier : « Après le martyre de Jacques et la destruction de Jérusalem qui arriva en ce temps, on raconte que ceux des apôtres et des disciples du Seigneur qui étaient encore en ce monde vinrent de partout et se réunirent en un même lieu avec les parents du Sauveur selon la chair (dont la plupart existaient à cette époque). Ils tinrent conseil tous ensemble pour examiner qui serait jugé digne de la succession de Jacques, et ils décidèrent à l'unanimité que Siméon, fils de ce Clopas dont parle l'Évangile, était capable d'occuper le siège de cette église : il était, dit-on, cousin du Sauveur : Hégésippe raconte en effet que Clopas était le frère de Joseph » (Eusèbe, Histoire Ecclésiastique, 3, 11).

Il est à noter que ces frères et sœurs de Jésus ne sont jamais appelés les fils et filles de Marie. Dans les Écritures, seul Jésus est désigné comme « le fils de Marie » (Mc 6, 3 ; notez le singulier), « le fils du charpentier » (Mt 13, 55), « le fils de Joseph (Jn 1, 45 ; Jn 6, 42 ; Lc 4, 22), et Marie est expressément appelée « la mère de Jésus » (Mc 6, 3), « sa mère » (Jn 19, 25-26 ; Lc 2, 33-34.48 ; Lc 8, 19 ; etc.).

Au pied de la croix, « Jésus donc voyant sa mère et, se tenant près d'elle, le disciple qu'il aimait, dit à sa mère : "Femme, voici ton fils." Puis il dit au disciple : "Voici ta mère." Dès cette heure-là, le disciple l'accueillit comme sienne » (Jn 19, 26-27). Si Marie avait eu d'autres enfants, il leur revenait de droit de s'occuper d'elle. Là, Jésus, seul enfant de Marie et qui en avait la responsabilité la confie donc à un disciple. Cette scène suppose aussi que Joseph n'était plus de ce monde à ce moment là.

2. Le couple Marie et Joseph

Le verset « Joseph ne la connut pas jusqu'au jour où elle enfanta un fils, et il l'appela du nom de Jésus » (Mt 1, 25), ne remet pas en cause la virginité perpétuelle de Marie. D’ailleurs, on lit dans la Bible :

  • « Samuel ne revit plus Saül jusqu'à sa mort » (1 S 15, 35). L'aurait-il vu après sa mort ?

  • « Mikal, fille de Saül, n'eut pas d'enfant jusqu'au jour de sa mort » (2 S 6, 23). Aurait-elle eu des enfants après sa mort ?

  • Saint Paul écrit à Timothée : « Jusqu'à ce que je vienne, applique-toi à la lecture, à l'exhortation, à l'enseignement » (1 Tm 4, 13). Devait-il arrêter la lecture et l'enseignement après l'arrivée de Paul ?

  • « Car il faut qu'il règne jusqu'à ce qu'il ait placé tous ses ennemis sous ses pieds » (1 Co 15, 25). Le Christ cessera-t-il de régner après l'anéantissement de ses ennemis ?

  • « Quant à Philippe, il se trouva à Azot ; continuant sa route, il annonçait la Bonne Nouvelle dans toutes les villes qu'il traversait, jusqu'à ce qu'il arrivât à Césarée » (Ac 8, 40). Philippe a-t-il cessé d'annoncer la Bonne Nouvelle dès l'instant de son arrivée à Césarée ?

En définitive, la phrase « Joseph ne la connut pas jusqu'au jour où elle enfanta un fils, et il l'appela du nom de Jésus » (Mt 1, 25) met en relief ce qui s'est passé avant la naissance de Jésus et ne permet pas de conclure qu'un comportement contraire a eu lieu après l'enfantement.

3. Jésus, le fils premier-né de Marie

« Or il advint, comme ils étaient là, que les jours furent accomplis où elle devait enfanter. Elle enfanta son fils premier-né, l'enveloppa de langes et le coucha dans une crèche, parce qu'ils manquaient de place dans la salle d'hôtes » (Lc 2, 6-7).

Le fait que Jésus soit désigné comme le fils « premier-né » de Marie ne signifie pas qu'elle ait eu d'autres enfants. En effet, « premier-né », en grec prototokos, désigne le fils aîné, mais signifie aussi et surtout le fils prééminent, celui qui a la plus haute importance. On peut le voir dans les Écritures :

  • « Alors tu diras à Pharaon : Ainsi parle Yahvé : mon fils premier-né, c'est Israël » (Ex 4, 22) ;

  • « En larmes ils reviennent, dans les supplications je les ramène. Je vais les conduire aux cours d'eau, par un chemin tout droit où ils ne trébucheront pas. Car je suis un père pour Israël et Éphraïm est mon premier-né » (Jr 31, 9) ;

  • « Et moi, j'en ferai mon premier-né, le plus grand des rois de la terre » (Psaume 89(88), 28) ! Il est question de David qui est pourtant le plus jeune fils de Jessé (1 S 16, 11-13).

C'est dans ce sens que Jésus, qui devait avoir en tout la primauté (Col 1, 18) est le « premier-né d'une multitude de frères » (Rm 8,29), le « premier-né de toute créature » (Col 1, 15), le « premier-né d'entre les morts » (Ap 1, 5 ; Col 1, 18). Jésus est désigné comme le Fils « premier-né » du Père (He 6, 1) et il est aussi son Fils unique (Jn 3, 16). Pourquoi, parce qu'il est en même temps le fils « premier-né » de Marie (Lc 2, 7), il ne pourrait pas être également le fils unique de Marie ?

4. La Virginité de Marie après la naissance de Jésus

Dans la Bible, il y a eu des couples stériles à qui Dieu a promis des enfants : Abraham dans sa vieillesse (Gn 18, 14), la mère de Samuel (1 S 1, 17), la mère de Samson (Jg 13, 2-5), Zacharie (Lc 1, 5-25). Pour tous ces couples, la conception de l'enfant se fait après l’union du mari avec sa femme. Le cas de Marie se comprend mieux en comparant l'Annonciation de Marie avec l'annonce à Zacharie, le père de Jean le Baptiste, tous deux visités par l’archange Gabriel.

Zacharie répond à l'ange : « À quoi saurai-je ? Car je suis vieux et ma femme est avancée en âge ? » (Lc 1, 18). Marie, elle, répond : « Comment cela se fera-t-il ? Car je ne connais pas d'homme » (Lc 1, 34) ?

Zacharie doute et demande un signe, lui qui savait qu’Abraham eut un fils avec sa femme Sarah alors que tous deux étaient âgés. Par contre, sans l’ombre du doute, Marie répond en termes de « comment » et s'interroge sur la façon de concilier l'inconciliable. Elle est déjà d'accord avec le plan de Dieu qui veut qu’elle enfante Jésus et se demande maintenant le « comment » des choses vu qu’elle veut rester vierge toute sa vie.

En effet, pour quelles raisons une nouvelle mariée, peu avant la vie commune, s’étonnerait-elle qu’on lui prédise la naissance d'un enfant dans un proche avenir et oserait demander à son interlocuteur angélique « comment » cet enfant serait conçu ? C’est que, même étant fiancée à Joseph, Marie laisse entendre par là qu'elle ne se voit pas tomber enceinte d’une union quelconque avec qui que ce soit. Elle oppose un état de fait, son désir de rester vierge toute sa vie à la volonté de Dieu de mettre au monde son Fils, et obtient la réponse : « Rien n'est impossible à Dieu » (Lc 1, 37) !

Selon saint Bernard, « la preuve qu'elle s'en tint à ce vœu irrévocable, c'est qu'à l'ange qui lui promettait un fils, elle répondit fermement : Comment cela se fera-t-il, Puisque je ne connais pas d'homme ? C'est pourquoi, sans doute, elle fut d'abord troublée par les paroles de l'ange et se demanda ce que voulait dire cette salutation qui la proclamait bénie entre les femmes, alors que son désir était de rester toujours bénie entre les vierges. Et de ce fait, la salutation lui paraissait déjà sujette à caution. Dès que la promesse d'un fils lui parut mettre en péril sa virginité, elle ne put cacher plus longtemps ses soupçons. Comment cela se fera-t-il ? dit-elle, je ne connais pas d'homme » (Saint Bernard de Clairvaux, Les 12 Prérogatives de la Bienheureuse Vierge Marie).

Les Pères de l’Église ont vu dans la Virginité perpétuelle de Marie l'accomplissent des prophéties d’Ézéchiel qui parlait du porche oriental du Temple, sorte de hall d'entrée, qui était rempli de la gloire de Dieu (Ez 10, 16-19 ; Ez 43, 1-4) et qui fut fermé après son départ : « Il me ramena vers le porche extérieur du sanctuaire, face à l'orient. Il était fermé. Yahvé me dit : Ce porche sera fermé. On ne l'ouvrira pas, on n'y passera pas, car Yahvé, le Dieu d'Israël, y est passé. Aussi sera-t-il fermé » (Ez 44, 1-2). Ainsi, Marie est la porte par laquelle Jésus seul est entré dans ce monde. Cela fait penser également à ce passage du Cantique des cantiques : « Elle est un jardin bien clos, ma sœur, ô fiancée ; un jardin bien clos, une source scellée » (Ct 4, 12). Bref, Jésus est le Fils unique de Marie.


Abbé Kizito NIKIEMA, prêtre de l'archidiocèse de Ouagadougou (Burkina Faso)

Cet article est extrait de son livre : La foi catholique face aux doctrines protestantes

Il est aussi l'auteur du livre : Mon corps et l'amour : la Bonne Nouvelle sur la sexualité


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