Les doctrines protestantes

Par l'appellation « Vierge Marie », les catholiques professent que Marie, la mère de Jésus n'a pas connu d'homme toute sa vie, et que Jésus est son unique Fils, conçu du Saint Esprit (Lc 1, 35). La mention de frères et sœurs de Jésus dans l'évangile est utilisée par certains protestants pour nier cette affirmation. Toutefois, les Saintes Écritures précisent qui sont les frères et les sœurs de Jésus dont il est question.

1. Les frères et sœurs de Jésus

L’Écriture parle des « frères » et des « sœurs » de Jésus notamment dans deux passages :

Une connaissance de la culture juive et des textes bibliques permet une meilleure intelligence de ces passages. Voici quelques exemples :

Mt 13, 54-56 cité ci-dessus donne les noms des frères de Jésus. Il s'agit de Jacques, Joseph, Simon et Jude. Leur parenté est élucidée lorsqu'on scrute les évangiles qui parlent de la mort de Jésus :

Il apparaît donc que la mère de Jacques, « le frère du Seigneur » (Ga 1, 19), s'appelait aussi Marie. La mère de Jacques est la sœur de la mère de Jésus. La mère de Jacques avait aussi pour fils Joset (Joseph) et Salomé. Leur père est Clopas ou Alphée (cf. Mt 10, 3 ; Mc 3, 18). Jude se désigne « serviteur de Jésus Christ, frère de Jacques » et non pas « frère de Jésus »(cf. Jude 1). Donc, Jude est aussi le fils de Cléophas et de Marie sœur de la Vierge Marie. En résumé, selon les Écritures, Cléophas et son épouse Marie avaient pour fils Jacques, Joseph et Jude.

Un livre d'histoire très ancien du IVème nous renseigne que Simon est un cousin du Christ. Il est fils de Clopas qui est lui-même le frère de Joseph le charpentier : « Après le martyre de Jacques et la destruction de Jérusalem qui arriva en ce temps, on raconte que ceux des apôtres et des disciples du Seigneur qui étaient encore en ce monde vinrent de partout et se réunirent en un même lieu avec les parents du Sauveur selon la chair (dont la plupart existaient à cette époque). Ils tinrent conseil tous ensemble pour examiner qui serait jugé digne de la succession de Jacques, et ils décidèrent à l'unanimité que Siméon, fils de ce Clopas dont parle l'Évangile, était capable d'occuper le siège de cette église : il était, dit-on, cousin du Sauveur : Hégésippe raconte en effet que Clopas était le frère de Joseph » (Eusèbe, Histoire Ecclésiastique, 3, 11).

Il est à noter que ces frères et sœurs de Jésus ne sont jamais appelés les fils et filles de Marie. Dans les Écritures, seul Jésus est désigné comme « le fils de Marie » (Mc 6, 3), « le fils du charpentier » (Mt 13, 55 ; notez le singulier), « le fils de Joseph (Jn 1, 45 ; Jn 6, 42 ; Lc 4, 22), et Marie est expressément appelée « la mère de Jésus » (Mc 6, 3), « sa mère » (Lc 2, 33-34.48 ; Lc 8, 19 ; Jn 19, 25-26 ; etc.)

Au pied de la croix, « Jésus donc voyant sa mère et, se tenant près d'elle, le disciple qu'il aimait, dit à sa mère : "Femme, voici ton fils." Puis il dit au disciple : "Voici ta mère." Dès cette heure-là, le disciple l'accueillit comme sienne » (Jn 19, 26-27). Si Marie avait d'autres enfants, il leur revenait de droit de s'occuper d'elle. Là, Jésus, seul enfant de Marie qui en avait la responsabilité la confie donc à un disciple. Cette scène suppose aussi que Joseph n'était plus de ce monde à ce moment là.

2. Le couple Marie et Joseph

Le verset « Joseph ne la connut pas jusqu'au jour où elle enfanta un fils, et il l'appela du nom de Jésus » (Mt 1, 25) ne remet pas en cause la virginité perpétuelle de Marie. D’ailleurs, quand on lit dans la Bible :

En définitive, la phrase « Joseph ne la connut pas jusqu'au jour où elle enfanta un fils, et il l'appela du nom de Jésus » (Mt 1, 25) met en relief ce qui s'est passé avant la naissance de Jésus et ne permet pas de conclure qu'un comportement contraire a eu lieu après l'enfantement.

3. Jésus, le fils premier-né de Marie

« Or il advint, comme ils étaient là, que les jours furent accomplis où elle devait enfanter. Elle enfanta son fils premier-né, l'enveloppa de langes et le coucha dans une crèche, parce qu'ils manquaient de place dans la salle. » (Lc 2, 6-7)

Le fait que Jésus soit désigné comme le fils « premier-né » de Marie ne signifie pas qu'elle ait eu d'autres enfants. En effet, « premier-né », en grec prototokos, désigne le fils aîné, mais signifie aussi et surtout le fils prééminent, celui qui a la plus haute importance. On peut le voir dans les Écritures :

C'est dans ce sens que Jésus, qui devait avoir en tout la primauté (Col 1, 18) est le « premier-né d'une multitude de frères » (Rm 8,29), le « premier-né de toute créature » (Col 1, 15), le « premier-né d'entre les morts » (Ap 1, 5 ; Col 1, 18). Jésus est désigné comme le Fils « premier-né » du Père (He 6, 1) et il est aussi son Fils unique (Jn 3, 16). Pourquoi, parce qu'il est en même temps le fils « premier-né » de Marie (Lc 2, 7), il ne pourrait pas être également le fils unique de Marie ?

4. La Virginité de Marie après la naissance de Jésus

Dans la Bible, il y a eu des couples stériles à qui Dieu a promis des enfants : Abraham dans sa vieillesse (Genèse 18, 14), la mère de Samuel (1 Samuel 1, 17), la mère de Samson (Juges 13, 2-5), Zacharie (Luc 1, 5-25). Pour tous ces couples, la conception de l'enfant se fait après l’union du mari avec sa femme. Le cas de Marie se comprend mieux en comparant l'Annonciation de Marie avec l'annonce à Zacharie, le père de Jean le Baptiste, tous deux visités par l’archange Gabriel.

Zacharie répond à l'ange : « A quoi saurai-je ? Car je suis vieux et ma femme est avancée en âge ? » (Luc 1, 18). Marie, elle, répond : « Comment cela se fera-t-il ? Car je ne connais pas d'homme ? » (Luc 1, 34)

Zacharie doute et demande un signe, lui qui savait qu’Abraham eut un fils avec sa femme Sarah alors que tous deux étaient âgés. Par contre, sans l’ombre du doute, Marie répond en termes de "comment" et s'interroge sur la façon de concilier l'inconciliable. Elle est déjà d'accord avec le plan de Dieu qui veut qu’elle enfante Jésus et se demande maintenant le "comment" des choses vu qu’elle veut rester vierge toute sa vie.

En effet, pour quelles raisons une nouvelle mariée, peu avant la vie commune, s’étonnerait-elle qu’on lui prédise un enfant dans un proche avenir et oserait demander à son interlocuteur angélique "comment" cet enfant serait conçu ? C’est que même étant fiancée à Joseph, Marie laisse entendre par là qu'elle ne se voit pas tomber enceinte d’une union quelconque avec qui que ce soit. Elle oppose un état de fait, son désir de rester vierge toute sa vie à la volonté de Dieu de mettre au monde son Fils, et obtient la réponse : « Rien n'est impossible à Dieu » (Luc 1, 37).

« La preuve qu'elle s'en tint à ce vœu irrévocable, c'est qu'à l'ange qui lui promettait un fils, elle répondit fermement : Comment cela se fera-t-il, Puisque je ne connais pas d'homme ? C'est pourquoi, sans doute, elle fut d'abord troublée par les paroles de l'ange et se demanda ce que voulait dire cette salutation qui la proclamait bénie entre les femmes, alors que son désir était de rester toujours bénie entre les vierges. Et de ce fait, la salutation lui paraissait déjà sujette à caution. Dès que la promesse d'un fils lui parut mettre en péril sa virginité, elle ne put cacher plus longtemps ses soupçons. Comment cela se fera-t-il ? dit-elle, je ne connais pas d'homme. » (Saint Bernard de Clairvaux, Les 12 Prérogatives de la Bienheureuse Vierge Marie)

Les Pères de l’Église ont vu dans la Virginité perpétuelle de Marie l'accomplissent des prophéties d’Ézéchiel qui parlait du porche oriental du Temple, sorte de hall d'entrée, qui était rempli de la gloire de Dieu (Ez 10, 16-19 ; Ez 43, 1-4) et qui fut fermé après son départ : « Il me ramena vers le porche extérieur du sanctuaire, face à l'orient. Il était fermé. Yahvé me dit : Ce porche sera fermé. On ne l'ouvrira pas, on n'y passera pas, car Yahvé, le Dieu d'Israël, y est passé. Aussi sera-t-il fermé. » (Ez 44, 1-2) Ainsi, Marie est la porte par lequel Jésus seul est entrée dans ce monde. Cela fait penser également à ce passage du Cantique des cantiques : « Elle est un jardin bien clos, ma sœur, ô fiancée ; un jardin bien clos, une source scellée. » (Ct 4, 12) Bref, Jésus est le Fils unique de Marie.